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Valoriser les ressources locales

 12 février 2009

Atelier : Valoriser des ressources locales

Comment le développement de l’écoconstruction peut-il créer de la richesse localement et participer à une dynamique sociale et économique sur un territoire ? Les éco matériaux sont ils toujours écologiques ? Comment construire de nouvelles filières intégrant les matériaux et les hommes des territoires tout en visant un moindre coût écologique ?

Au travers de cas concrets et différents, s’interroger comprendre, évaluer la notion de valorisation des nos ressources locales renouvelables dans le cadre de l’éco-construction.

  • à la recherche d’un impact économique social écologique et bioclimatique
  • à la recherche de la « bonne échelle » et ses difficultés
  • de l’approche par la filière à l’approche par le territoire en passant par l’éco-construction comme étant LA filière

L’atelier regroupait une vingtaine de personnes d’horizons très divers (associations, artisans, paysans, industriels, architectes, institutionnels…) avec pour chacun une expérience très spécifique (association travaillant sur le développement d’une filière locale de chanvre, projet d’usine de bois pour ouverte entre autre à l’auto-construction, une DDE qui travaille à la constitution d’un écocentre…). Les filières chanvre, paille, bois et laine étaient représentées. La 1ère demi-journée fut donc consacrée à la présentation par les différents intervenants, de leurs recherches et de leurs réalisations.

Chacun des intervenants a souligné sa volonté de maîtriser le processus de la production du matériau à la commercialisation, voire à la mise en œuvre, avec dans ce cas là une volonté de faire du client un acteur. L’objectif pour tous est de trouver les moyens d’influer localement d’un point de vue économique, social et environnemental en re-localisant l’économie, en se réappropriant les ressources.

Lors des présentations, de nombreuses difficultés sont apparues :

  • difficultés pour la production : certains expliquent avoir du mal à motiver des agriculteurs à s’engager dans une nouvelle filière à cause du cahier des charges très stricte qui demande de s’investir à chaque étape du processus. Est évoqué le problème d’orienter, de conseiller les agriculteurs qui veulent se diversifier, faute d’informations, de recherche et de réalisations.
  • difficultés pour la transformation aussi : Certains revendiquent le fait de « bidouiller » des machines mais les problèmes techniques freinent beaucoup le développement de filière. D’autres se plaignent de l’absence de recherche scientifique sur les écomateriaux. Des programmes officiels de recherche attachés aux performances des écomatériaux faciliteraient beaucoup le travail de lancement des filières nouvelles...
  • difficultés de trouver des artisans formés à ces matériaux, difficultés à trouver des financements pour des formations spécifiques, difficultés liées à l’absence d’avis technique sur les éco-materiaux

Question de la demande :

Pourtant, tous les intervenants s’accordent à dire que la demande est réelle, une demande qu’il faut pouvoir satisfaire rapidement pour certains, « avant que les gros industriels s’y intéressent et fixent les prix ». Pour d’autres répondre à la demande de production n’est pas l’objectif : c’est soit la sensibilisation, soit le développement d’une cohésion de territoire qui prime. Pour d’autres encore, il est important de mettre au point des projets sinon rentables, du moins « diffusables » ou « reproductibles », au risque de voir perdurer des pratiques décriées. Pour certains, la recherche principale du rendement et de la rentabilité n’est pas la piste à suivre, au risque de voire se reproduire une certaine spécialisation des régions de production. Mais le positionnement des industriels sur le marché des écomateriaux reste mal apprécié et certains s’interrogent sur la capacité des filières locales à se démarquer. Pour les représentants de certaines filières locales, celles-ci peuvent être des niches sur le marché, valorisé par une éthique de l’écoconstruction locale. Un participant explique que les recherches pour le développement d’une filière locale ne doivent pas être menées sur la stratégie d’exploitation d’un matériau mais sur la volonté d’imaginer une échelle de fonctionnement qui soit économique, social et environnemental, adaptée à un territoire.

Question de l’échelle

Pour beaucoup c’est bien la question du développement des filières à l’échelle d’un territoire qui stimule les projets. L’exemple du plateau de Millevaches, où une vingtaine de projets de construction paille sont programmés d’ici trois ans, est symptomatique. La production de paille localement n’est pas assez importante pour satisfaire la demande. Mais l’idée de devoir importer de la paille est hors de question et certains se demandent si il ne faut pas mieux orienter les clients vers d’autres matériaux comme le chanvre. Ainsi, la culture du chanvre en Limousin peut être considérée comme d’intérêt général dans l’idée d’une relocalisation de l’économie et d’autonomie des territoires, même si par ailleurs cette même culture serait « plus rentable » 100km plus bas. Cette idée d’intérêt général doit permettre de trouver du soutien politique. A partir de là se pose la question de « l’échelle du territoire ». Les parcs naturels peuvent être des échelles intéressantes pour certains, d’autant que les PNR mènent une politique de soutien à l’expérimentation et que le développement des éco-materiaux fait partie de leurs projets. Certains objectent que les producteurs intéressés par la démarche de filière ne sont pas forcément installés dans le périmètre d’un parc (exemple de l’Auvergne où les producteurs de chanvre ne sont pas à l’intérieur du parc des Volcans)

Cependant certaines expériences d’organisation de plate-formes, comme pour le stockage du bois pour les chaudières collectives sur le plateau de Millevaches, peuvent être un exemple. Enfin certains redoutent qu’à vouloir que toutes les nouvelles filières soient sur tout les PNR cela n’aboutisse qu’à la mise en concurrence des productions. Ainsi, sur certains territoires, il n’y a plus de « place » et que relancer de nouvelles productions sous prétexte de subvenir localement aux besoins, ou parce que c’est « tendance », peut amener à recréer des désordres.

Question des partenaires

Tous les intervenants participants à des projets de création de filière locale évoquent le problème de trouver des partenaires, tant sur le plan financier, pour la communication, mais aussi des partenaires politiques. Les filières paysannes souffrent d’un manque de crédibilité, dû notamment au manque de recherche, mais aussi par manque d’exemples à faire valoir, et d’informations. Pour un représentant de la filière chanvre, les filières paysannes n’intéressent plus les financiers. De leurs côtés, des représentants de PNR font valoir qu’ils disposent de moyens importants, moyens financiers mais aussi moyens de communication pour mieux faire connaître ces filières locales et qu’ils sont engagés dans une politique d’expérimentation, même si pour l’instant ils n’en sont qu’au stade de la réflexion concernant les éco-materiaux. Les plate-formes technologiques et scientifiques peuvent-être des partenaires dans la recherche. Cependant, ces plate-formes ne travaillent qu’à partir de demandes précises d’entreprises qui les sollicitent. Des participants expliquent aussi que les partenaires financiers qu’ils ont pu trouver réclament de déposer des brevets pour se mettre en sécurité, des partenaires qui sont dans des optiques de production industrielle. Cela dit, cette protection par le brevet sert juste, dans leur cas, à se protéger les deux premières années...et permettre de continuer à être dans un processus dynamique mais en aucune façon à « bloquer » une filière, un nouveau matériau... Dans le même temps, les agriculteurs engagés dans ces filières veulent éviter de tomber dans une nouvelle dépendance vis-à-vis des subventions qui les obligeraient à trop produire et donc à trouver des débouchés nouveaux, pour amortir du matériel trop cher et au final ne plus rien maîtriser du tout.

Pistes à suivre :

Au fur et à mesure des discussions, l’idée s’impose que ce n’est pas telle ou telle filière qu’il faut valoriser mais bien l’écoconstruction en général. Les filières sont perçues comme les ingrédients de l’autonomie du territoire et doivent donc être pensées comme les parties d’un tout. Les recherches devraient être menées plus globalement sur l’écoconstruction, pas filière par filière, chacun « dans son coin ». Le développement des écocentres, de lieux proposant des informations, des conseils mais aussi des réalisations, parait donc essentiel à la fois pour communiquer sur ces filières et pour les rendre plus crédibles, notamment auprès des artisans et d’éventuels investisseurs.

Avec le soutien du FEDER :